Sieste gâchée
- Hé, papy ! Tu pionces ? qu'elle me lance, Lorella. Trop futée pour ne pas connaître déjà la réponse qui, d'ailleurs, ne manque pas d'arriver, genre retour de courrier.
- Jamais, tu m'entends... jamais je ne dors l'après-midi ! La sieste, ça vous alourdit, que je réplique avec l'indicible culot des ancêtres.
Vaincu par la pesanteur, je les porte en permanence mes poids de cent kilos. Bien sûr que je n'en suis plus désormais à une sieste près et qu'avec bonheur j'en profite.
Tout ensommeillé encore, ou frais et dispos au contraire, lever le cul de mon fauteuil m'apparaît comme un exploit, une performance d'anthologie qu'il faudrait à chaque fois consigner.
- On ne cesse de répéter que nos compatriotes manquent par trop d'esprit d'entreprise, mais certains extrêmes, inversement, nous poussent à nous interroger, qu'imprudemment elle se lance Lorella.
Quelle audace de venir déranger un vieux râleur alors qu'il semblait pour une fois à peu près satisfait. En apparence bien tranquille, hein ?
Pourquoi Lorella ne se fie-t-elle pas aux apparences, contrairement à tant d'autres ?
Donc, Lorella, elle insiste :
- Papy, si demain ça va de mal en pis, s'il y a encore surenchère par rapport à aujourd'hui, où on peut pas dire que c'est resplendissant... Ca signifie que des voyous iront piller les hôpitaux à supposer qu'ils soient encore ouverts au public...
"La difficulté d'accès aux soins, la pénurie de médicaments... il n'y aura peut-être que les coupures de courant pour les faire oublier ! Le parfait survivaliste est un misanthrope rêvant d'une totale autonomie. Il n'est pas simple de passer pour un esprit frondeur lorsqu'on a appartenu durant toute sa longue vie à la fourmilière. Sans parler qu'il en faut pour ça de la santé ! Avoue papy qu'il y a quand même de quoi se sentir dépassé.
"Si le pillage devient comme c'est probable une règle de vie, qui pourra se prétendre en sécurité ? Même convenablement préparé à la baston... T'as jamais envisagé la possibilité qu'on doive foutre le camp d'ici ?"